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En 1953, Max Ernst se réinstalle à Paris après un exil de plus de treize ans. La palette est l'un des grands tableaux inscrits dans la tradition de la peinture européenne réalisés par l'artiste à cette époque, comme pour célébrer son retour. La palette, tout comme Le Surréalisme et la Peinture, chef-d'oeuvre de 1942, représente le peintre en train d'accomplir l'acte mystérieux et noble de son art. Alors qu'il vient de remporter le prestigieux Grand Prix de la Biennale de Venise, il conçoit donc La palette comme une oeuvre résolument introspective. Le sujet, l'acte de peindre lui-même, a des précédents dans l'histoire de la peinture européenne remontant jusqu'au XVIe siècle au moins et, comme une large part du travail de Max Ernst, est une affirmation de son identité et de son humanité. Dans La palette, il représente le peintre en un être mystique. Le personnage central avec ses attributs reptilien rappelle "Loplop", l'alter ego spirituel d'Ernst, muse et guide l'entraînant vers les tréfonds de son imagination.
Habituellement une figure masculine, quelquefois androgyne, Loplop est ce qu'Ernst décrira plus tard comme "le Supérieur des Oiseaux, une créature privée qui m'est très attachée et toute dévouée" (cité in Cahiers d'Art, Paris, 1937, p. 24). Loplop apparaît pour la première fois dans l'oeuvre d'Ernst dans ses collages de la fin des années 1920 et est rapidement identifié par l'artiste comme une sorte d'alter ego ou de guide mystique vers les profondeurs de son inconscient. Les oiseaux ont toujours joué un rôle essentiel dans l'imaginaire d'Ernst. Il finit lui-même en vieillissant par ressembler de plus en plus à un volatile, avec son nez évoquant un bec et sa chevelure blanche pareille à un plumage; la mort étrange d'un perroquet familier, alors qu'il était enfant, au moment même de la naissance de sa soeur eut un impact profond et durable sur lui. Il rappelle cet événement étrange dans ses notes autobiographiques: "Un ami du nom de Horneborn, un fidèle oiseau bicolore meurt pendant la nuit; la même nuit un bébé, numéro six, s'éveille à la vie. Confusion de l'esprit pour ce garçon en bonne santé (Ernst jeune) - une sorte de manie de l'interprétation, comme si l'innocent nouveau-né, sa soeur Loni, avait dans sa soif de vivre, pris possession des fluides vitaux de son oiseau favori. La crise est vite surmontée. Mais dans l'esprit du garçon demeure une confusion volontaire et irrationnelle entre les images des êtres humains et les oiseaux et autre créatures, ce qui se reflète dans les symboles de son art" ('Biographische Notizen', in Max Ernst, catalogue d'exposition, Zurich, Kunsthaus, 1962, p. 23). Loplop devient pour Ernst une sorte de personnage chamanique, de talisman. Comme dans notre tableau, le personnage de Loplop joue bientôt le rôle d'intermédiaire dans l'art d'Ernst et est souvent dépeint en train de présenter une toile ou une oeuvre d'art au sein du tableau lui-même. Dans ces oeuvres, se joue un jeu entre réalité et illusion, rappelant les autoportraits de Picasso de la fin des années 1920, le représentant dans son studio en train de peindre l'un de ses modèles. Dans beaucoup des tableaux où figure Loplop, l'artiste le peint comme si c'était lui qui était le créateur, le découvreur des surprenantes images révélées, et qui attirait généreusement l'attention d'Ernst sur son art. Ces oeuvres représentant Loplop comme à la fois oiseau-artiste, palette et maître de cérémonie apparaîssent de façon récurrente dans le travail du peintre à partir de 1930.
In 1953 Ernst settled once again in Paris after having been living in exile from Europe for over thirteen years. La palette is one of the great paintings in the grand tradition of European painting that Ernst made at this time as if by way of celebrating his return. Taking as its subject the painter and his art, La palette, like his earlier masterpiece of 1942, Surrealism and Painting, depicts the artist in the mysterious and noble act of making his art. 1953 was indeed a vintage year for the artist, as he had won the prestigious Grand Prix of the Venice Biennale, making La palette even more self-reflective than could be imagined.
This subject, the act of painting itself, has precedents in the history of European painting running back to at least the sixteenth century, and is, like much of Ernst's art, a statement of identity. Here, in La palette, Ernst depicts the painter as a mystic being. The central figure with snake-like attributes recalls "Loplop", Ernst's spiritual alter ego and muse-like guide to the underworld of his imagination.
Usually male though sometimes androgynous, Loplop was what Ernst later described simply as the "Bird Superior, a private phantom very much attached and devoted to me" (cited in Cahiers d'Art, Paris, 1937, p. 24). Loplop made his first appearances in Ernst's work in his collages of the late 1920s, and was soon recognised by the artist as a kind of alter-ego or mystic guide to the netherworld of his unconscious imagination. Birds had always played a profound part in Ernst's imagination. Throughout his life, he grew increasingly to look like one, with his beaked nose and feathery hair. As a child the bizarre death of his pet parrot at precisely the same moment his sister was born had a profound and long-lasting impact on him. As he recalled in his autobiographical notes of this strange event: "A friend by the name of Horneborn, an intelligent piebald, faithful bird dies during the night; the same night a baby, number six, enters life. Confusion in the brain of this otherwise quite healthy boy (the young Ernst) - a kind of interpretation mania, as if the newborn innocent, sister Loni, had in her lust for life, taken possession of the vital fluids of his favourite bird. The crisis is soon overcome. Yet in the boy's mind there remains a voluntary if irrational confounding of the images of human beings with birds and other creatures, and this is reflected in the emblems of his art" ('Biographische Notizen', in Max Ernst, exhibition catalogue, Zurich, Kunsthaus, 1962, p. 23).
The bird figure of Loplop became for Ernst a kind of shamanic figure and talisman. As represented in this work, the figure of Loplop soon took on the role of intermediary in Ernst's art, and is often depicted presenting a canvas or work of art within the picture itself. In these works a game between reality and illusion is played similar to that of Picasso's late 1920s self-portraits of himself painting a model in his studio. In many of Ernst's Loplop paintings, the artist presents Loplop as if it were Loplop that was the creator and discoverer of the surprising images on show and is generously bringing his art to Ernst's attention. These works which depict Loplop as part bird-artist, part easel, part master of ceremonies, are a recurring format in Ernst's work from the 1930s onward.
Habituellement une figure masculine, quelquefois androgyne, Loplop est ce qu'Ernst décrira plus tard comme "le Supérieur des Oiseaux, une créature privée qui m'est très attachée et toute dévouée" (cité in Cahiers d'Art, Paris, 1937, p. 24). Loplop apparaît pour la première fois dans l'oeuvre d'Ernst dans ses collages de la fin des années 1920 et est rapidement identifié par l'artiste comme une sorte d'alter ego ou de guide mystique vers les profondeurs de son inconscient. Les oiseaux ont toujours joué un rôle essentiel dans l'imaginaire d'Ernst. Il finit lui-même en vieillissant par ressembler de plus en plus à un volatile, avec son nez évoquant un bec et sa chevelure blanche pareille à un plumage; la mort étrange d'un perroquet familier, alors qu'il était enfant, au moment même de la naissance de sa soeur eut un impact profond et durable sur lui. Il rappelle cet événement étrange dans ses notes autobiographiques: "Un ami du nom de Horneborn, un fidèle oiseau bicolore meurt pendant la nuit; la même nuit un bébé, numéro six, s'éveille à la vie. Confusion de l'esprit pour ce garçon en bonne santé (Ernst jeune) - une sorte de manie de l'interprétation, comme si l'innocent nouveau-né, sa soeur Loni, avait dans sa soif de vivre, pris possession des fluides vitaux de son oiseau favori. La crise est vite surmontée. Mais dans l'esprit du garçon demeure une confusion volontaire et irrationnelle entre les images des êtres humains et les oiseaux et autre créatures, ce qui se reflète dans les symboles de son art" ('Biographische Notizen', in Max Ernst, catalogue d'exposition, Zurich, Kunsthaus, 1962, p. 23). Loplop devient pour Ernst une sorte de personnage chamanique, de talisman. Comme dans notre tableau, le personnage de Loplop joue bientôt le rôle d'intermédiaire dans l'art d'Ernst et est souvent dépeint en train de présenter une toile ou une oeuvre d'art au sein du tableau lui-même. Dans ces oeuvres, se joue un jeu entre réalité et illusion, rappelant les autoportraits de Picasso de la fin des années 1920, le représentant dans son studio en train de peindre l'un de ses modèles. Dans beaucoup des tableaux où figure Loplop, l'artiste le peint comme si c'était lui qui était le créateur, le découvreur des surprenantes images révélées, et qui attirait généreusement l'attention d'Ernst sur son art. Ces oeuvres représentant Loplop comme à la fois oiseau-artiste, palette et maître de cérémonie apparaîssent de façon récurrente dans le travail du peintre à partir de 1930.
In 1953 Ernst settled once again in Paris after having been living in exile from Europe for over thirteen years. La palette is one of the great paintings in the grand tradition of European painting that Ernst made at this time as if by way of celebrating his return. Taking as its subject the painter and his art, La palette, like his earlier masterpiece of 1942, Surrealism and Painting, depicts the artist in the mysterious and noble act of making his art. 1953 was indeed a vintage year for the artist, as he had won the prestigious Grand Prix of the Venice Biennale, making La palette even more self-reflective than could be imagined.
This subject, the act of painting itself, has precedents in the history of European painting running back to at least the sixteenth century, and is, like much of Ernst's art, a statement of identity. Here, in La palette, Ernst depicts the painter as a mystic being. The central figure with snake-like attributes recalls "Loplop", Ernst's spiritual alter ego and muse-like guide to the underworld of his imagination.
Usually male though sometimes androgynous, Loplop was what Ernst later described simply as the "Bird Superior, a private phantom very much attached and devoted to me" (cited in Cahiers d'Art, Paris, 1937, p. 24). Loplop made his first appearances in Ernst's work in his collages of the late 1920s, and was soon recognised by the artist as a kind of alter-ego or mystic guide to the netherworld of his unconscious imagination. Birds had always played a profound part in Ernst's imagination. Throughout his life, he grew increasingly to look like one, with his beaked nose and feathery hair. As a child the bizarre death of his pet parrot at precisely the same moment his sister was born had a profound and long-lasting impact on him. As he recalled in his autobiographical notes of this strange event: "A friend by the name of Horneborn, an intelligent piebald, faithful bird dies during the night; the same night a baby, number six, enters life. Confusion in the brain of this otherwise quite healthy boy (the young Ernst) - a kind of interpretation mania, as if the newborn innocent, sister Loni, had in her lust for life, taken possession of the vital fluids of his favourite bird. The crisis is soon overcome. Yet in the boy's mind there remains a voluntary if irrational confounding of the images of human beings with birds and other creatures, and this is reflected in the emblems of his art" ('Biographische Notizen', in Max Ernst, exhibition catalogue, Zurich, Kunsthaus, 1962, p. 23).
The bird figure of Loplop became for Ernst a kind of shamanic figure and talisman. As represented in this work, the figure of Loplop soon took on the role of intermediary in Ernst's art, and is often depicted presenting a canvas or work of art within the picture itself. In these works a game between reality and illusion is played similar to that of Picasso's late 1920s self-portraits of himself painting a model in his studio. In many of Ernst's Loplop paintings, the artist presents Loplop as if it were Loplop that was the creator and discoverer of the surprising images on show and is generously bringing his art to Ernst's attention. These works which depict Loplop as part bird-artist, part easel, part master of ceremonies, are a recurring format in Ernst's work from the 1930s onward.